Depuis sa création en 1989, Source
Vive a toujours accueilli dans ses locaux de LIsle-Adam des familles
denfants atteints de cancer ou de leucémie, cest-à-dire
les enfants malades, leurs parents, mais également leurs frères
et surs.
En raison de lépreuve quils
ont eux aussi à traverser, ces enfants représentent une population
en danger qui nécessite une grande vigilance et un accompagnement.
La rupture de rythme liée aux hospitalisations fréquentes, léloignement
dû à la présence de lun des parents auprès
de lenfant malade, la gestion du quotidien et langoisse permanente
plongent ces enfants dans linsécurité matérielle
et affective. Souvent obligés dassumer des tâches allant
au-delà de leurs possibilités dautonomie, contraints parfois
de supporter les moments de détresse de leurs parents, ils expriment
peu leur inquiétude dans le cadre du système familial.
Leur condition de bien-portants peut être
vécue par eux dans un sentiment de culpabilité vis-à-vis
de lenfant malade. Les frères et les surs ont le plus souvent
une représentation claire de la gravité de la maladie et du
risque vital encouru.
Même sil sagit dune
maladie qui se guérit de mieux en mieux, le cancer nen demeure
pas moins un sujet dont on parle difficilement. Dire que son frère
ou sa sur a un cancer se fait sous le sceau du secret. A cette dimension
de secret se rattache aussi la notion de honte. Dune manière
générale, les frères et les surs ne parlent pas
de la maladie à lextérieur de la maison, sauf peut-être
à quelques camarades, de manière événementielle
ou informative.
Les enfants éprouvent souvent un sentiment
de solitude et de tristesse, et souffrent à la fois de labsence
de la mère et de celle de lenfant malade. Quand ce dernier revient
à la maison entre les périodes dhospitalisation, ses frères
ou surs ressentent alors un sentiment de responsabilité vis-à-vis
de lui, souvent lourd à assumer, et sinvestissent dans un rôle
parental, même lorsquils sont très jeunes.
Tant que lenfant est malade, il semble
presque impossible aux frères et aux surs de saccorder
du plaisir, tant ils sont inquiets. Si lagressivité sexprime
parfois à lextérieur et particulièrement
à lécole au début de la maladie, elle est
généralement bannie dans la famille : pas de colère,
pas dhostilité ou de rivalité vis-à-vis de lenfant
malade. Car, même si un sentiment de jalousie peut-être éprouvé
vis-à-vis de celui-ci, ressenti alors par les frères et surs
comme le préféré des parents, comment serait-il possible
de vivre une compétitivité et une rivalité normales entre
frères et surs, alors que lun dentre eux encourt
un risque vital ? La jalousie, lagressivité impossibles à
dire, sexpriment souvent plus tard, dune manière ou dune
autre.
Face à un tel constat, le soutien psychologique aux frères et aux surs d'enfants ou d'adolescents atteints de cancer relève quasiment de la prévention. A l'association Source Vive, cet accompagnement est réalisé gratuitement lorsque les familles le souhaitent, de manière individuelle ou dans le cadre de groupes de fratrie régulièrement organisés.
L'avant-dernier d'entre eux a donné lieu à l'élaboration collective d'un conte qui, sous une forme imagée, exprime comment les frères et surs participant au groupe, en tant que fratrie d’un enfant malade, ont su trouver les ressources nécessaires pour traverser cette difficile épreuve.
La dimension collective permet de rompre avec le temps de l’isolement et de la dispersion familiale liés à la maladie. Le conte représente métaphoriquement le cheminement de chacun et celui du groupe : il se réfère aux relations familiales et à la relation avec les thérapeutes. Il transforme et transporte l’individu, son monde et son style relationnel par l’usage des symboles (monstres, combattants, fées etc.). Il attribue des rôles et suggère la logique d’une histoire qui se passe en d’autres lieux et d’autres temps. Il transfère les tensions supposées au sein de la famille dans un contexte plus universel où les intéressés peuvent se contempler comme spectateurs, s’identifier entièrement ou partiellement avec les personnages mis en scène. Pour lire le conte : Les mésaventures de la fée double-face.